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Titre de la source : Au bas de l’échelle : Exploitation et maltraitance des filles travaillant comme domestiques en GuinéeAuteur(s) : Juliane Kippenberg
Éditeur(s) : Human Rights Watch
Année : 2007
Au bas de l’échelle : Exploitation et maltraitance des filles travaillant comme domestiques en Guinée (PDF, 7,7 Mo)
Des milliers de filles employées comme domestiques en Guinée sont victimes d’exploitation au travail et de mauvais traitements, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié à la veille de la Journée internationale de l’Enfant africain.
Le rapport de 120 pages, intitulé « Au bas de l’échelle : Exploitation et maltraitance des filles travaillant comme domestiques en Guinée », décrit de façon détaillée la façon dont des jeunes filles dont certaines n’ont que huit ans travaillent jusqu’à 18 heures par jour comme employées domestiques, fréquemment sans être payées, et sont souvent insultées, battues et violées par leurs employeurs. Le travail domestique est le principal secteur d’emploi des enfants en Guinée. Des filles viennent d’aussi loin que le Mali, et certaines sont victimes de la traite et du travail forcé.
« Les filles recrutées pour servir comme employées domestiques en Guinée vivent souvent dans des conditions analogues à l’esclavage, et nombre d’entre elles sont victimes de la traite », a dit Juliane Kippenberg, chercheuse à la division des Droits de l’enfant à Human Rights Watch, et auteur du rapport.
La grande majorité des filles interrogées par Human Rights Watch ont affirmé que leurs employeurs refusaient de les inscrire à l’école, même quand d’autres enfants de la famille allaient à l’école. Les efforts actuels en Guinée pour accroître la scolarisation des filles dans l’enseignement primaire, en accord avec les Objectifs du Millénaire pour le développement visés par les Nations Unies, ne sont pas dirigés vers les filles travaillant comme domestiques.
Une fille de 15 ans, envoyée à l’âge de huit ans par son père à la capitale Conakry pour y travailler pour une femme, a déclaré à Human Rights Watch : « La femme a proposé à mon père de s’occuper de moi et de m’envoyer à l’école… Je n’ai pas été en contact avec mon père depuis… Les autres enfants de la famille vont à l’école, mais pas moi. Il n’a plus jamais été question de la promesse de m’envoyer à l’école. Je fais les travaux domestiques et je vends du piment. Quand elle n’est pas là, son mari me réveille et me viole. Il m’a menacée avec un couteau et il a dit que je ne devais le dire à personne. Il le fait chaque fois que sa femme est en voyage. J’ai peur. »
Il n’existe aucun système de protection de l’enfant en Guinée. La traite, la maltraitance et l’exploitation au travail des enfants font rarement l’objet de poursuites judiciaires. En mars, un nouveau gouvernement est entré en fonction à la suite de manifestations populaires contre la corruption, la mauvaise gouvernance et l’aggravation des conditions économiques. Le nouveau Premier Ministre, Lansana Kouyaté, s’est engagé à établir l’Etat de droit et à améliorer les conditions de vie des jeunes.
« Mettre un terme aux abus commis contre les filles employées comme domestiques devrait être une priorité du programme du nouveau gouvernement relatif aux jeunes », a affirmé Kippenberg. « Les ONG locales constituent actuellement l’unique source de protection et d’assistance pour les enfants travaillant comme domestiques, mais elles manquent de ressources et ne peuvent pas couvrir tout le pays de façon systématique. »
Human Rights Watch fait appel au gouvernement guinéen, avec le soutien de ses bailleurs de fonds internationaux et des organisations intergouvernementales, dont l’UNICEF, pour :
* Mener des enquêtes et sanctionner les coupables de traite des enfants, de violences sexuelles et physiques contre les enfants, et d’exploitation au travail. Prendre des mesures pour professionnaliser le personnel judiciaire et empêcher la corruption au sein du système judiciaire.
* Mettre en place un système de protection de l’enfant qui permette un contrôle systématique des enfants n’étant pas sous la garde de leurs parents, en particulier des filles travaillant comme domestiques. Ceci permettrait de soustraire des filles à des environnements où elles subissent de mauvais traitements, afin soit de les réunir avec leurs propres familles, soit de les placer dans des familles d’accueil si cette solution est la meilleure pour l’enfant. Un tel système de protection devrait être créé en étroite collaboration avec les agences internationales et les ONG nationales.
* Prendre des mesures spécifiques pour améliorer l’accès à l’éducation des filles travaillant comme domestiques, telles que la création de davantage d’écoles qui proposent un enseignement primaire aux enfants au-delà de l’âge habituel d’inscription (les centres NAFA, ou « écoles de la seconde chance ») à Conakry et dans d’autres zones urbaines.
* Amender l’article 5 du Code du travail, et le Décret 2791 sur le Travail des enfants, en vue de fixer à 15 ans l’âge minimum pour travailler. Faire appliquer les protections existantes contre le travail des enfants et aider les enfants travailleurs domestiques à obtenir réparation devant les tribunaux du travail.
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