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Titre de la source : Approche genrée des droits humains chez les personnes en situation de handicapAuteur(s) : Fatima Mazari, Annick Riani, Claudine Blasco
Éditeur(s) : ATTAC Pays d’Aix
Pays d'édition : France
Année : 2007
Approche genrée des droits humains chez les personnes en situation de handicap (PDF, 203 Ko)
Comment la variable « sexe » et le handicap se conjuguent-ils ? Les femmes handicapées subissent-elles un effet cumulatif des préjugés fondés sur la corrélation sexe / invalidité ? Si tel est le cas, comment cet effet se manifeste-t-il ?
Dans le cadre de l’analyse sur les inégalités et sur la pauvreté des femmes, la Commission Genre et Mondialisation d’ATTAC Pays d’Aix s’est intéressée aux femmes handicapées qui semblent être oubliées dans toutes les recherches.
Introduction :
« Six cent cinquante millions de personnes, soit 10% de la population mondiale, se trouvent aujourd’hui en situation de handicap et ce chiffre est en constante augmentation en raison de la croissance démographique, des avancées médicales et du vieillissement de la population, observe l’Organisation mondiale de la santé (OMS) : les personnes en situation de handicap constituent la plus large minorité du monde. Dans les pays où l’espérance de vie dépasse 70 ans, chaque individu encourt statistiquement le risque de passer en moyenne 8 ans (soit 11,5%) de sa vie en situation de handicap.
Nous sommes donc tou-te-s concerné-e-s par ce phénomène. Cependant, cette population de personnes en situation de handicap est inégalement répartie de par le monde : ainsi, selon le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), 80% des personnes en situation de handicap vivent dans les pays en voie de développement. Et si ce phénomène est plus marqué dans les pays pauvres que dans les pays riches, c’est que la pauvreté, aujourd’hui accrue par le renforcement des inégalités liées au libéralisme, est l’un des facteurs majeurs de l’augmentation du nombre de personnes handicapées à travers le monde. La Banque mondiale estime que 20% des personnes les plus pauvres sont handicapées et ont tendance à être considérées comme plus désavantagées par les membres de leur propre communauté. Ainsi s’explique largement le caractère sexo-spécifique marqué du phénomène. En effet, la domination patriarcale s’appuie sur le libéralisme pour maintenir à l’endroit des femmes des discriminations économiques, sociales, culturelles et politiques qui accentuent les inégalités hommes / femmes et la misère. Aussi, pour l’Organisation de la Coopération et du Développement Economiques (OCDE), « la fréquence des handicaps est plus élevée chez les femmes que chez les hommes.» En France, d’après le rapport d’étude de l’ADAPT , de Jean-Joseph Kuperholc et Marc Hatzfeld de juillet 2004, « les femmes vivant à leur domicile déclarent globalement être plus souvent affectées d’une déficience que les hommes (42,4 % contre 38,3%). « Cette étude laisse apparaître que les femmes se déclarent plus handicapées que les hommes, sauf pour ce qui concerne la reconnaissance sociale du handicap. Ainsi 8,4 millions de femmes, parmi lesquelles beaucoup d’étudiantes et de personnes âgées – déclarent-elles souffrir d’un handicap non reconnu officiellement. Mondialement, les femmes en situation de handicap souffrent de désavantages multiples et surtout d’exclusion au motif de leur sexe et du handicap : « l’effet cumulatif des préjugés fondés sur la corrélation sexe / invalidité aboutit à ce que, souvent, les femmes handicapées soient moins indépendantes, aient moins accès à l’instruction et à l’emploi que les hommes handicapés ou les femmes valides. » Les stéréotypes liés au statut des femmes dans certaines sociétés, les comportements entre la gêne, la condescendance et les « attitudes charitables » dans nos sociétés aboutissent à la négation des droits et de la citoyenneté des handicapées reléguées dans une double invisibilité : invisibles parce que femmes et invisibles parce qu’handicapées. Entre répulsion et pitié, les personnes handicapées ont été marginalisées et leur invisibilité relative (voire absolue) a été généralement admise comme allant de soi ou acceptée comme « naturelle ». Et, dans nos sociétés où les différences donnent lieu à des hiérarchisations (toujours fâcheuses pour les femmes par exemple), la différence liée à l’invalidité a été perçue comme un motif d’exclusion. Certains programmes d’assistance sociale, plus propices à l’isolement qu’à la socialisation, ont largement contribué à cette exclusion et ces considérations ont retardé la prise de conscience et la mobilisation collective en faveur des droits de toutes et de tous.
Enfin, trop souvent encore, le handicap est abordé sous le seul angle de la santé publique alors qu’il n’est que la conséquence de la maladie. Ainsi compris, le handicap – ou bien plutôt ses conséquences sur la vie sociale – relève précisément de l’organisation sociale et donc de la justice sociale. Il devient une question collective, et non plus individuelle, devant donner matière à des débats publics : les personnes en situation de handicap doivent avoir accès aux droits et à la pleine et entière citoyenneté. En situation de handicap ou non, nous devons tous vivre nos différences dans la plus grande égalité de droits et de dignité. »
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