Ressource
Titre de la source : Crise alimentaire mondiale et alternatives féministesAuteur(s) : Massan d'Almeida
Éditeur(s) : AWID (titulaire de la licence de l'article)
Année : 2010
Crise alimentaire mondiale et alternatives féministes (PDF, sur le site d'AWID)
Dans cette analyse de la crise alimentaire mondiale, Massan d’Almeida apporte un regard sur les causes de la crise, ses effets, et sur les alternatives possibles, notamment celles impliquant les organisations féministes. « La crise alimentaire, du point de vue des organisations de la société civile, est l’effet pervers plus général de politiques empêchant la responsabilité de bien des décideurs. »
Voici l’introduction de l’article :
« Entre février et mai 2008, des émeutes de la faim ont éclaté dans plusieurs pays du Sud et particulièrement en Afrique : le Sénégal, le Burkina Faso, le Mozambique, l’Egypte, l’Algérie, la Côte d’Ivoire, la Mauritanie, Madagascar, le Cameroun et d’autres pays ont ainsi été secoués par le cri d’alerte de la population qui ne pouvait plus faire face à l’envolée des prix des aliments de base comme le riz, l’huile l’arachide, les pommes de terre, le blé…
Cette flambée des prix alimentaires qui a donné lieu aux « émeutes de la faim » provoqué un véritable drame humain qui perdure depuis 2008, dont on parle de moins en moins en raison des effets dévastateurs de la crise économique et financière actuelle. Le prix mondial du blé a presque triplé en trois ans, doublé en un an ; celui du riz a augmenté de plus de 50 %. Le coût d’un repas a été surenchéri de 40 % en un an dans les pays pauvres. Dans les ménages où l’alimentation représente jusqu’à 75 % du budget d’un ménage, ces hausses de prix ont eu des conséquences catastrophiques. Elles ont fortement contribué à faire passer des millions de gens sous le seuil de pauvreté et effacer des années d’efforts de développement.
Certaines révoltes ont été conduites par des femmes et beaucoup d’autres ont été soutenues par ces actrices trop souvent écartées des analyses journalistiques, institutionnelles et universitaires. Ne parvenant plus à nourrir leurs familles, étant confrontées à la faim de leurs enfants, elles sont sorties dans la rue pour manifester, leur désarroi face à une situation économique qui les rend encore plus vulnérables.
La présence des femmes dans les émeutes de la faim s’explique d’abord par leur rôle au sein du foyer. En tant que mères de famille, elles doivent subvenir aux besoins de leurs enfants dans des conditions qui sont aujourd’hui devenues intolérables. D’autre part, elles sont particulièrement investies dans le commerce informel des denrées alimentaires (transport, transformation et vente aux détails des produits alimentaires) et la hausse des prix des matières premières agricoles les obligent à leur tour à augmenter les prix des produits de leur commerce ; malheureusement ces hausses de prix ont provoqué des méventes généralisée – car les revenues des ménages n’ont pas été augmenté – entrainant la faillite de plusieurs d’entres elles faisant d’elles les doubles victimes de la crise.
Mais avant d’incarner les victimes les plus touchées des politiques libérales, elles sont d’abord les premières actrices du système agricole africain. En Afrique, les femmes représentent la fraction la plus importante (près de 51%) de la population au niveau de chaque pays dont environ 70% vivent en milieu rural. Dans l’agriculture, elles constituent près de 60% des actifs agricoles et sont présentes à toutes les phases des travaux agricoles où elles sont responsables de plus de 40% des labours, 70% du sarclage et des récoltes, 80% des semis et 90% des activités de transformation des produits agricoles. Elles mènent leurs activités surtout dans le secteur informel et leur rôle dans les activités domestiques est prédominant sur celui des hommes.
Sur le plan social, elles jouent un rôle irremplaçable en tant que mère et épouse. Mais, en dépit de leur rôle au plan social et dans les activités de production, les femmes africaines font l’objet d’un certain nombre d’exclusions et d’interdits sociaux qui font d’elles les premières victimes de la pauvreté. Les femmes sont plus vulnérables à plusieurs égards que les hommes à la pauvreté, une vulnérabilité qui renvoie au manque de recours, à l’insécurité et au fait d’être exposé à tous les risques y compris les effets pervers de la crise alimentaire.
Mais, quelles sont les raisons qui expliquent cette situation ? »
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté(e) pour rédiger un commentaire.