Dans un entretien avec Observaction, Awa Fall Diop, sénégalaise qui se définit comme le produit des plusieurs mouvements sociaux (syndical, politique et citoyen), nous parle de la prise ne compte du genre dans les mouvements sociaux du continent africain.
Q. 1. Quel est d’après vous la différence entre un réseau/plateforme d’organisations et un mouvement
R. Un Réseau, en général, tout comme une plate-forme identifie ses membres, est structuré de façon à la fois horizontale et verticale. Il faut être acceptée par les organes du réseau ou de la plate-forme pour pouvoir se définir comme membre.
Un mouvement possède différentes caractéristiques : une dimension collective, se définit des cibles, des adversaires et pose des revendications.
- les membres d’un mouvement social partagent un système de valeurs ou ont un projet en commun, se sentent liées par un sentiment d’appartenance.
- la capacité de mobiliser, de réunir un certain nombre de personnes pour des évènements ponctuels.
- des formes de protestation du mouvement social sont extrêmement variées, en voici quelques exemples : pétition, grève, grève du zèle, blocage des routes, , occupation de bâtiments, fête de rue, Sit-in …
Le mouvement est une forme d’action collective concertée en faveur d’une cause.
Selon Alain Touraine, trois principes permettent d’identifier un mouvement social :
– un principe d’identité ì: définition du mouvement collectif par lui-même (qui représente-t-il et au nom de qui parle-t-il?) ;
– un principe d’opposition : identification de l’adversaire (contre qui ou contre quoi le mouvement lutte-t-il?) ;
– un principe de totalité ì: le mouvement propose un projet de société alternatif, fondé sur des valeurs et ne se limite pas à la défense d’intérêts particuliers comme une plate-forme.
Une fois créé, toute entité qui s’en réclame, dans le respect des 3 principes énoncés par Alain Touraine, en devient membre, sans au préalable requérir l’approbation ou l’aval d’une quelconque instance. L’obligation, c’est d’œuvrer au projet de société, en s’identifiant comme membre du mouvement et en agissant selon les valeurs partagées.
Q. Comment comprend-on le genre dans les différents mouvements
que vous avez eu à observer
R. En Afrique, pour beaucoup d’organisations, selon mon expérience, la dimension politique, le positionnement stratégique et transformationnel du genre leur échappe, en tant que projet de société alternatif au patriarcat.Le genre demeure un simple champ de connaissances expurgé de sa dimension de praxis sociale à la fois individuelle et collective. Le genre n’est pas toujours conçu comme l’arme magique qui dissout la domination masculine d’hier et d’aujourd’hui et construit l’égalité maintenant et demain, mais plutôt comme « quelque chose » dont on parle, comme on parlerait d’une mode qui vient et qui va passer
Q. Ceci dit le mouvement des droits des femmes en Afrique est-il le mouvement par excellence où parler du genre?
R. le mouvement des femmes, en l’état actuel et si tant il est qu’il existe en tant que mouvement, ne dispose pas encore de la vision, des ressources porteuses de la nécessaire transformation sociale dont le monde, l’Afrique, francophone en particulier, a besoin. Mais il n’y a aucune alternative : il doit se construire, le mouvement. Il doit exister, le mouvement et il doit porter le genre au firmament de l’action collective afin de générer un changement profond dans les rapports patriarcaux de pouvoir.
FIN.
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